« Une bonne nouvelle pour tous les acteurs de la terre crue » se réjouit Mustoihi Mari, Président de l'Association Art-Terre et maître d'ouvrage du département alors même qu'un rapport récent de l'Autorité de la Concurrence** établit que les produits de construction sont 35% plus chers à Mayotte qu'en métropole.
Le Bloc de terre comprimé (BTC) : une solution locale, géo-sourcée, vernaculaire déjà utilisée dans de nombreuses constructions à Mayotte
« La latérite est locale, géo-sourcée, renouvelable, recyclable, isolante et son mode de fabrication par malaxage compression et séchage en font un produit de premier rang pour la réalisation du gros-œuvre intégrant les grands paramètres du développement durable » souligne Dominique Tessier, architecte. « Le Bloc de Terre Comprimée (BTC) de Mayotte est déjà utilisé dans un très grand nombre de construction » ajoute Vincent Lietar, architecte et maître d'ouvrage. « Nous estimons que plus de 20% de la population mahoraise vit dans une construction en blocs de terre comprimée ».
Matériaux de construction 35% plus chers à Mayotte qu'en métropole : le Bloc de terre comprimé pourrait devenir un levier de développement d'activité et d'emplois
L'autorité de la Concurrence dans un rapport publié le 3 octobre 2018 sur les matériaux de construction à la Réunion et à Mayotte fait « un constat préoccupant » et écrit que « les prix des matériaux de construction sont de 39% plus élevés à la Réunion et de 35% plus élevés à Mayotte par rapport à la métropole ». Parmi les explications retenues par le rapport : les coûts de transport et de stockage de matériaux majoritairement importés et des normes inadaptées aux spécificités d'outremer.
Cette ATEx permettra de démontrer l'intérêt la brique de terre crue compressée du point de vue constructif, économique et environnemental. Cette ATEx est donc non seulement une façon de reconnaître la pertinence et la performance de cette technique constructive mais c'est aussi un levier de développement de l'emploi et de l'économie mahorais. La mobilisation va continuer pour accompagner et pérenniser cette technique constructive qui répond si bien aux enjeux spécifiques mahorais.
Le BTC a connu son apogée dans les années 90 en produisant, après 10 ans de développement, près de 2,5 millions de blocs par an. Mayotte comptait alors 17 briqueteries artisanales qui ont participé à la construction de près de 11 000 logements. Aujourd'hui, elles ne sont plus que 5 mais la relance attendue avec cette ATEx devrait leur profiter et pourrait aussi intéresser des entreprises du BTP plus familières du béton.
Ces dernières années, différents projets ont soutenu l'utilisation de la BTC : des bâtiments publics, comme par exemple le collège de Dembeni ou encore la salle de sport à Chiconi ainsi que plusieurs opérations de logements réalisés par la SIM (Société immobilière de Mayotte) pour qui la brique crue redevient un élément des prescriptions dans le cadre de sa production sociale ou intermédiaire.
Avec cette ATEx, le champ s'ouvre à des programmes d'une nouvelle génération dont certains sont particulièrement importants comme le lycée des métiers de Longoni (800 000 BTC). Blaise Tricon, responsable des constructions du Vice rectorat de Mayotte voit dans la technique BTC « un matériau à la pointe de la recherche en matière de développement durable qui correspond au concept de frugalité dans le choix des ressources ».
Une démarche amorcée il y a 20 ans
La prise en considération à Mayotte de l'importance de la normalisation avait conduit à une première norme sur la fabrication de la brique de terre crue comprimée en 2001 (XP-P13 901).
Pour la mise en œuvre, les travaux pour répondre aux exigences réglementaires avaient démarré en 1998 initialement portés par la SIM (Société Immobilière de Mayotte).
Ils ont été repris en 2007 par l'Association Art-Terre Mayotte créée pour soutenir, promouvoir la filière terre et notamment porter l'instruction du dossier d'ATEx. Par ailleurs, la norme expérimentale XP-P13 901 a fait l'objet d'une révision organisée par le CTMNC (Centre Technique de Matériaux Naturels de Construction) avec la participation de nombreux professionnels et bien sûr l'Association Art-Terre.
Cette norme sera prochainement publiée par l'AFNOR.
* ATEx 2588 / cliquez ici pour en savoir plus
** Rapport Autorité de la Concurrence / cliquez ici pour en savoir plus