Tout avait plutôt bien commencé: la socialiste Carole Delga, qui a pris la tête de Régions de France cet été, abordait la venue du chef du gouvernement en appelant au "pragmatisme" lors d'un congrès dont le thème était "Vers une République de la confiance".
La présidente d'Occitanie a rappelé que cette région était aussi celle du Premier ministre. "Vous avez un accent. Moi aussi ! Vu d'en haut il pourrait nous valoir parfois quelques railleries. Mais à travers lui, c'est la réalité de la France qui s'exprime ! C'est notre étendard", a-t-elle assuré.
Dans son discours, elle s'est toutefois insurgée contre une chute de 177 millions d'euros des recettes et dotations pour les régions prévue dans le projet de budget 2022 présenté il y a une semaine, précisant qu'elle attendait des "réponses concrètes" de la part du chef du gouvernement.
Dans son intervention, il a pris la balle au bond: "Dans le projet de loi de finances pour 2022, le gouvernement tiendra son engagement de neutraliser les conséquences de la suppression des impôts de production, en compensant l'année prochaine la baisse des frais de gestion perçus au titre du financement de la formation professionnelle", a-t-il affirmé.
"C'est un engagement fort pour vos finances, à hauteur de 107 millions d'euros, qui portera la compensation totale à 127 millions d'euros", a-t-il ajouté, répondant ainsi partiellement à la demande de Mme Delga.
"Nous n'irons pas plus loin", a toutefois prévenu le chef du gouvernement, en référence aux 50 millions de dotation restants dont les régions ont dénoncé la suppression.
Après son discours, Mme Delga a immédiatement organisé une réunion extraordinaire des présidents de régions.
En conférence de presse, la présidente, aux côtés du LR Renaud Muselier, président délégué, a fustigé le fond et s'est insurgée contre la forme, notamment la pique envoyée par M. Castex au sujet d'un récent communiqué virulent de Régions de France.
"Point besoin, mesdames et messieurs les présidents de régions, de m'envoyer des communiqués de presse ou alors, si possible, après que nous nous soyons vus", a-t-il grincé, avant d'appeler les élus "au travail, au service de nos concitoyens", une injonction qui n'a pas été appréciée, selon des sources des régions.
"Très choqués"
"Nous avons été très choqués par le ton employé dans ce discours", a affirmé Mme Delga, le qualifiant "d'humiliant", et assurant qu'elle prendrait des décisions dans les prochains jours.
"Il n'est pas possible de recevoir des leçons sur ce ton, données de cette façon, pensant que nous n'avons pas su travailler. Nous avons autant de légitimité que les ministres", s'est-elle exclamée.
La présidente de l'Occitanie a d'ailleurs reçu le soutien du président LR du Sénat Gérard Larcher: "les dotations ne sont pas des variables d'ajustement budgétaire", a-t-il déclaré lors du congrès.
Dans son intervention, M. Castex a assuré que l'Etat n'avait pas "laissé tomber les collectivités territoriales" pendant la crise sanitaire.
Selon lui, l'impact de la crise s'est élevé à 92 milliards d'euros en 2020 pour le budget de l'Etat, contre quatre milliards de pertes pour les collectivités.
Quant aux dotations, elles "sont restées parfaitement stables" sous ce quinquennat, a-t-il souligné, rappelant qu'elles avaient diminué de 10 milliards entre 2013 et 2017.
En recevant M. Castex, Mme Delga avait exhorté à "trouver les voies d'un dialogue respectueux", rappelant que les relations entre les régions et le gouvernement ont connu de nombreuses tensions depuis l'arrivée à l'Elysée d'Emmanuel Macron, surtout quand Edouard Philippe était à Matignon. Les collectivités avaient ainsi claqué la porte de la conférence nationale des territoires en juillet 2018 en dénonçant des faux-semblant de concertation.
"Depuis 2017, nous sommes allés parfois de difficultés en incompréhensions. La confiance est une relation et cela ne peut exister quand on est moins de deux", a-t-elle plaidé.