Juillet 2017 : le chef de l'Etat tout juste élu annonçait une grande réforme pour "aboutir à une organisation institutionnelle stabilisée et efficace" du Grand Paris. Un an et demi plus tard, les décisions n'ont cessé d'être repoussées et la "métropole Macron" n'a pas de réalité concrète.
D'abord, pourquoi réformer cette Métropole du Grand Paris (MGP) mise en place début 2016, qui regroupe Paris et 130 communes d'Ile-de-France ?
"On a une métropole qui est tout à fait sous-calibrée, une gouvernance éclatée et une MGP croupion qui a quelques dizaines de millions d'euros de budget réel", analyse Romain Pasquier, directeur de recherche au CNRS, spécialiste des collectivités.
"Donc, il faut réformer et c'est un tel imbroglio qu'il faut réformer fort. Tout le monde le sait, mais personne n'est prêt à assumer les coûts politiques pour le faire", poursuit-il.
L'idée du chef de l'Etat était de "simplifier drastiquement les structures" pour asseoir Paris et sa métropole dans la compétition internationale et éviter les doublons entre les communes, communautés d'agglos ou Etablissements publics territoriaux (EPT), les sept départements et la Région d'Ile de France.
Parmi les scénarios envisagés : une métropole au périmètre actuel, en fusionnant les départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne) avec Paris, ou encore une fusion de la région IDF et de l'actuelle métropole, pour associer Paris intra-muros et des secteurs périurbains ou ruraux.
"Cas d'école"
Mais si Emmanuel Macron pouvait envisager une vaste réforme au lendemain de son élection, avec des scores très importants en Ile-de-France, sa popularité s'est effondrée depuis et l'exécutif ne peut guère s'appuyer sur des élus locaux avec qui les relations se sont fortement détériorées.
Chaque collectivité défend son périmètre et l'hypothèse émise dans un rapport du préfet d'Ile-de-France de supprimer les départements de la petite couronne a provoqué la colère des présidents des Conseils départementaux qui dénoncent "des propositions extravagantes".
Dès lors, l'idée de renvoyer au lendemain des municipales de mars 2020 toute décision sur l'évolution de la métropole se profile.
"Les éléments ne sont pas réunis pour une réforme", constate un bon connaisseur du dossier. "L'idée, c'est que la scène politique soit décantée, autrement dit attendre les élections, et dire que c'est un sujet tellement sérieux qu'il doit être discuté dans une campagne électorale", souligne-t-il.
L'architecture actuelle de la MGP, présidée par l'ancien ministre Patrick Ollier (LR), est complexe et les enjeux d'une réforme sont considérables en terme de gouvernance, de transports, de développement économique, mais aussi de coût financier. L'ensemble de la région parisienne représente environ 30% du PIB français.
"On se retrouve dans un cas d'école de non décision et de bureaucratie à la française tout à fait exceptionnel. Les choses ne bougent pas parce qu'il y a beaucoup d'intérêts corporatistes contradictoires", déplore Romain Pasquier. Avec en toile de fond, la rivalité entre la maire de Paris, Anne Hidalgo (PS), et la présidente de la région IDF, Valérie Pécresse (LR).
Chef de file des opposants à la MGP, le président des Hauts-de-Seine Patrick Devedjian (LR) voit pour sa part dans le report des arbitrages de l'Elysée la prise de conscience des difficultés.
"Je pense que le président de la République a compris que la réforme de la MGP sur le périmètre de la petite couronne lui vaudrait le reproche de faire la +métropole des riches+ et que c'est un grave inconvénient politique", soutient-il.
Le big-bang institutionnel s'annonce en revanche comme l'un des thèmes de campagne des municipales.
Dernier épisode en date, l'architecte Roland Castro a remis fin septembre à Emmanuel Macron un rapport sur sa vision du Grand Paris que l'Elysée lui a demandé "de diffuser le plus largement possible" pour susciter le débat.