L'année dernière, 368.000 jeunes ont signé un contrat d'apprentissage, dont 353.000 dans le secteur privé, contre 317.000 en 2018.
Cette croissance, pour la première fois à deux chiffres (après +7,8% en 2018), "concerne tous les secteurs d'activité, tous les territoires et tous les niveaux de qualification", s'est réjouie Muriel Pénicaud en présentant les résultats.
"L'image de l'apprentissage se transforme de filière d'échec en voie royale vers l'emploi", a assuré la ministre qui passe rarement une semaine sans visiter un centre de formation d'apprentis (CFA).
Par secteur, le nombre d'apprentis a progressé de 13% dans le BTP et de 11% dans l'industrie.
Si la hausse reste tirée par le supérieur (+30%), l'apprentissage, alternance entre formation en CFA et travail en entreprise, a redémarré dans le secondaire, là où son effet sur l'insertion dans l'emploi est le plus fort.
Après une décennie difficile, les effectifs, du CAP au bac pro, sont en hausse de 8%. Et 70.000 jeunes ont formulé des voeux d'apprentissage sur Affelnet (plateforme d'orientation en fin de 3e), 40% de plus en deux ans.
Le nombre d'apprentis a augmenté de 37% chez les Compagnons du Devoir, de 15% dans les Maisons familiales rurales et de 3% dans les Chambres des métiers et de l'artisanat (CMA).
Pour Mme Pénicaud, ce boom est la conséquence de "la suppression des règles qui bridaient le développement de l'apprentissage" grâce à la réforme votée en septembre 2018.
L'entrée en CFA a été assouplie (limite d'âge repoussée de 26 à 30 ans, possibilité d'entrer en cours d'année), les conditions d'emploi améliorées (aide de 500 euros pour le permis, aide unique pour les entreprises) tout en étant plus flexibles (dérogation à la durée de travail des mineurs, etc.).
La réforme a surtout totalement libéralisé l'offre. Les CFA peuvent désormais ouvrir sans autorisation des régions et recruter un formateur sans passer par le rectorat. Résultat: le ministère a enregistré 554 demandes d'ouverture de CFA, dont 200 déjà réalisées, qui viennent s'ajouter aux 965 CFA existant. Ces demandes émanent de branches professionnelles, d'organismes de formation mais aussi d'entreprises confrontées à des difficultés de recrutement.
Garantir le financement
"On a maintenant la liberté d'ouvrir des sections là où l'emploi se trouve. Sans la loi, nous n'aurions pas pu faire ce chiffre", a témoigné Jean-Claude Bellanger, secrétaire général des Compagnons du devoir.
En outre, les CFA ne sont plus financés par les régions mais par l'intermédiaire des branches et en fonction du nombre de jeunes sous contrat. Dès lors qu'un jeune et une entreprise signent un contrat d'apprentissage, le CFA est assuré d'avoir le financement de la formation.
"Comme c'est un droit de tirage, le système est inflationniste. Si on continue sur des hausses à deux chiffres, le budget de trois milliards d'euros va augmenter de plusieurs centaines de millions par an", reconnaît-on dans l'entourage de Mme Pénicaud. A cette fin, une mission Igas/IGF a été mandatée pour "assurer la soutenabilité du système à moyen terme".
A côté du financement, l'autre chantier du ministère est de recenser l'offre de formation pour la mettre dans un premier temps sur Affelnet et Parcoursup, puis de faire le lien avec les offres des entreprises.
Cette auto-satisfaction de l'exécutif irrite profondément les régions, amères d'avoir perdu cette compétence depuis le 1er janvier et qui ont dénoncé dans un communiqué "les mensonges de Madame Pénicaud".
"La croissance à deux chiffres, ce sont les régions qui en sont à l'origine !", a revendiqué Régions de France, rappelant avoir "financé l'apprentissage à hauteur de 9 milliards d'euros sur les cinq dernières années".
"Les subventions régionales ont baissé de 8% en 2019", créant des difficultés de trésorerie dans certains CFA, a rétorqué Mme Pénicaud.
"Des chamailleries", selon le président des CMA Bernard Stalter pour qui la loi a permis de "communiquer sur l'apprentissage comme on aurait dû le faire depuis 20 ans".