Suivant la promesse d'un acte 2 du quinquennat plus "délibératif", le Premier ministre a marqué le coup en accueillant 19 organisations - mêlant syndicats, ONG ou Fondations - qui avaient été "forces de propositions" au printemps durant le Grand débat, selon Matignon.
Ces dernières ont quitté la rue de Varenne "mitigées", a indiqué Patrick Doutreligne, président de l'Uniopss, une organisation qui représente plusieurs associations caritatives dont le Secours Catholique ou Médecins du monde. Il y a "un vrai espoir car la méthode a changé indéniablement. Mais il n'y a aucune mesure concrète proposée", a-t-il relevé.
"S'il y a une volonté en terme de méthode de faire évoluer les choses, maintenant il va falloir aussi des actes concrets", a souligné pour sa part Laurent Berger, après plus de 2 heures de réunions autour de M. Philippe et de cinq ministres dont Elisabeth Borne (Transition écologique), Agnès Buzyn (Santé) et Muriel Pénicaud (Travail).
Pour l'heure, le gouvernement "n'a rien lâché", a déploré M. Doutreligne.
Le collectif du "Pacte" était venu présenter ses 8 mesures d'urgence parmi lesquelles l'interdiction de la location de logements indignes et de passoires énergétiques, l'évaluation de l'impact de toute nouvelle loi sur les 10% les plus pauvres, ou la revalorisation des minima sociaux au même rythme que les revenus du travail.
"Vous ne pourrez pas changer tout d'en haut, il faut travailler avec nous, les citoyens, la crise démocratique est trop forte", a indiqué au gouvernement Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé-Pierre.
A ce stade, a regretté M. Robert, "force est de constater que le gouvernement n'a pas voulu accélérer, n'a pas dit qu'il allait mettre plus de moyens dans le projet de loi de finances".
Pourtant, en recevant les organisations avant le séminaire gouvernemental du 4 septembre et avant le bouclage des textes financiers, il s'agissait "en amont" de "se nourrir de la vision d'un certain nombre d'acteurs en matière sociale et de transition écologique", avait glissé Matignon.
Marge de manoeuvre
Une manière d'affirmer qu'une marge de manoeuvre existe sur les grandes réformes à venir (retraites, dépendance, pacte productif...). A ce titre, un "calendrier de travail sur les trois mois à venir" a été transmis aux participants, selon M. Robert.
Matignon a aussi fait remarquer qu'il y avait "énormément de choses mises en oeuvre ou en chantier, qu'il s'agisse de la transition écologique, de l'égalité hommes-femmes, de la lutte contre la fraude fiscale, du logement" et qui font écho aux revendications des signataires.
En accédant à la demande des signataires d'être entendus, M. Philippe soigne aussi une relation parfois détériorée avec Laurent Berger, alors que les partenaires sociaux seront reçus les 5 et 6 septembre à Matignon pour préparer la refonte du système des retraites.
Lundi, Emmanuel Macron a envoyé un signal fort, salué mardi par M. Berger, en affichant sa préférence pour un calcul des droits à la retraite lié à la durée de cotisation plutôt qu'à l'âge de départ.
Enfin, juste avant la rentrée scolaire, cette rencontre était aussi l'occasion d'insister sur la thématique écologique, en adressant un signe à Nicolas Hulot, co-initiateur de ce pacte, quasiment un an jour pour jour après sa démission fracassante du gouvernement en raison de désaccords.
Sur l'écologie, "on veut montrer qu'on ne lâche pas la balle, qu'on a compris le problème et que ce n'est pas qu'un sujet pré-élections européennes", martèle un conseiller de l'exécutif.
Le Premier ministre va d'ailleurs réserver son premier déplacement après les vacances à Roubaix (Nord) jeudi, "un territoire innovant en termes de gestion des déchets".
Les organisations attendent "des actes" et "du concret"
Les organisations à l'initiative du "Pacte du pouvoir de vivre" ont reconnu mardi "une porte ouverte" mais attendent "du concret" et "des actes", ont-elles fait savoir, à l'issue de deux heures d'entrevue mardi avec le Premier ministre à Matignon.
"S'il y a une volonté en terme de méthode de faire évoluer les choses, maintenant il va falloir aussi des actes concrets", a réagi Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, aux côtés de 18 autres organisations. L'ancien ministre de l'Ecologie, Nicolas Hulot, qui avait aussi initié ce pacte au printemps, avec sa fondation, n'était pas présent mais représenté.
Du côté de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert, délégué général, a souligné avoir dit au gouvernement: "vous ne pourrez pas changer tout d'en haut, il faut travailler avec nous, les citoyens, la crise démocratique est trop forte".
"De ce point de vue là, il semble que le gouvernement ouvre la porte en disant: cette expertise, cette capacité de changement, on peut la faire avec vous", a-t-il ajouté, faisant état d'un "calendrier de trois mois" de travail.
Mais sur la question des "passoires thermiques", l'une des demandes phares des ONG, "le gouvernement n'a pas voulu accélérer, n'a pas dit qu'il allait mettre plus de moyens dans le projet de loi de Finances" (PLF), a-t-il regretté.
"Il va falloir des actes forts, des preuves d'amour", a-t-il assuré.
"Il y a le PLF 2020, nous avons porté des ambitions sociales (...) écologiques (...) et donc on attendra des actes", a renchéri Laurent Berger.
"On a senti une modification dans l'ouverture" mais "aujourd'hui il n'a rien lâché", a lancé pour sa part Patrick Doutreligne, de l'Uniopss (Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux), déplorant qu'"aucune mesure concrète" n'ait été "proposée".
Le collectif a mis en exergue plusieurs "mesures d'urgence", comme interdire la location de logements indignes et de passoires énergétiques, évaluer l'impact de toute nouvelle loi sur les 10% les plus pauvres ou revaloriser les minima sociaux et les faire évoluer au même rythme que les revenus du travail.