Comment mieux considérer la valeur de l’eau de pluie ? A la lecture du plan Eau présenté la semaine dernière, cette question apparaît comme représentative des attentes d’une filière à la recherche d’une évolution majeure de leur secteur. En particulier, celles des entreprises membres de l’IFEP, qui promeut depuis plus de 15 ans les vertus de la récupération de l’eau de pluie.
Le syndicat se félicite d’emblée de la prise en compte de la ressource comme une priorité nationale : « tous les acteurs, publics, privés, particuliers, sont concernés par ce plan qui a l’avantage de mettre à plat tous les grands chantiers entourant l’eau, le diagnostic est bien posé » souligne-t-il. L’IFEP se satisfait en outre du caractère territorial du plan qui n’a pas vocation à tout centraliser, mais prévoit au contraire une gestion de l’eau au niveau des bassins. Néanmoins, si les 53 mesures, notamment celles encadrant la sobriété, sont positives, l’IFEP note un objectif global concernant la réduction de l’eau prélevée moins ambitieux que durant les Assises de l’eau de 2019 qui prévoyaient une diminution de 10% d’ici 2024. Ce nouveau plan prévoit en effet d’en reculer l’échéance à 2030.
Massifier la récupération de l’eau de pluie pour atteindre les objectifs d’économies d’eau
La réutilisation d’eau de pluie est une solution qui s’intègre parfaitement à ce plan Eau et permettra d’atteindre les objectifs d’après l’IFEP. « Pour une maison individuelle, jusqu’à 44% du volume d’eau potable consommé peut-être substitué par de l’eau de pluie, une économie conséquente qui contribuera à l’objectif global des 10% d’économie d’eau demandé par le gouvernement » affirment ses représentants. Utiliser l’eau de pluie pour des usages spécifiques comme ceux des toilettes, du lavage des sols, de la machine à laver et de l’arrosage représente pour un foyer « des centaines de litres d’eau potable économisés par jour, donc une diminution très nette du prélèvement » précisent-ils.
A condition que les mesures afférentes à ce sujet soient précisées voire renforcées. C’est pourquoi l’IFEP appelle à une réflexion collective sur la réutilisation de l’eau de pluie comme ressource alternative pour diminuer les prélèvements en eau potable. Le syndicat demande particulièrement :
- Une généralisation sur l’ensemble du territoire : au regard de la sécheresse de 2022, la quasi-intégralité des départements était touchée par des mesures de restriction d’eau (Arrêtés sécheresse). A l’heure du réchauffement climatique, tous les territoires sont concernés par les tensions sur la ressource. Or, les modalités d’accompagnement mentionnées dans la mesure 6 du plan Eau restent à définir. Etant donné la situation, la réutilisation de l’eau de pluie ne peut se limiter à certains territoires ou certains contextes, mais doit être systématisée et globalisée.
- Une généralisation sur tous les types de bâtiments : une dynamique est à trouver pour sensibiliser l’ensemble des publics à l’utilisation de l’eau de pluie : les particuliers, les collectivités, le monde agricole, les acteurs industriels… La mesure 19 ne peut pas seulement concerner les bâtiments agricoles, mais doit être généralisée à tous les bâtiments ou structures ayant des surfaces de toitures importantes et des besoins en adéquation. Dans l’industrie, la récupération et valorisation de l’eau de pluie dans les process doivent faire partie des plans de sobriété des différentes filières.
- L’obligation d’équiper les constructions neuves (résidentielles, tertiaires, industrielles…) : comme c’est le cas en Allemagne ou en Belgique, l’équipement systématique pour récupérer l’eau de pluie des futurs bâtiments doit être débattu. C’est la seule façon d’assurer la transition de la société vers la sobriété en eau potable. En commençant par renforcer la démarche Etat exemplaire évoquée en mesure 5 : l’Etat doit systématiser l’installation d’équipements de récupération d’eau de pluie sur tous ses bâtiments neufs.
Par ailleurs, l’IFEP se tient à la disposition des autorités pour étudier l’élargissement de l’utilisation de l’eau de pluie à un périmètre éventuellement plus grand que celui actuellement défini par l’arrêté du 21 août 2008 (mesure 15 concernant la levée des freins réglementaires). En outre, l’IFEP accueille favorablement le fait que des moyens financiers supplémentaires soient dédiés à l’accompagnement de nouveaux projets, d’autant plus s’ils concernent des projets de valorisation des Eaux Non-Conventionnelles dont fait partie la récupération de l’eau de pluie (mesures 38, 39 & 41).
Des solutions rapidement déployables, partout et pour tous
Pour respecter le calendrier prévu par le plan Eau du gouvernement, la récupération de l’eau de pluie fait partie des solutions efficaces les plus rapides à mettre en place selon l’IFEP. Les métiers référents disposent de solutions techniques innovantes, encadrées par une réglementation datant de 2008. Principaux avantages de ces solutions : éviter le gaspillage de l’eau potable en réadaptant certains usages avec de l’eau de pluie, prévenir le risque inondation (face à des pluies plus rares mais plus extrêmes) et augmenter l’autonomie (en particulier pour les maisons individuelles).
Pour Thomas Contentin, président de l’IFEP : « La sobriété en eau signifie aussi adapter la qualité de son eau à ses usages. La réutilisation de l’eau de pluie va tout à fait dans ce sens, des solutions éprouvées et pérennes existent pour réduire efficacement la consommation d’eau potable des bâtiments. Si la France veut faire des économies d’eau, c’est avec la récupération de l’eau de pluie qu’elle a le plus de chance de tenir ses engagements. Les acteurs de notre filière sont prêts. »