Jeudi, la Ville de Paris a annoncé qu'elle allait interdire, dans le cadre de son futur Plan local d'urbanisme (PLU), la création de nouveaux meublés touristiques dans des zones en proie au "surtourisme", où on manque de logements toute l'année.
"Des secteurs entiers de Paris vont être interdits aux créations de nouveaux meublés touristiques parce que nous considérons que l'offre est déjà très abondante et nous visons un étalement et un équilibre d'implantation dans Paris intra-muros", a expliqué à la presse Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la maire PS de Paris.
"L'enjeu est simple, c'est d'essayer de réguler, voire de juguler la pression du marché qui fait réduire le stock de logements disponibles au profit des résidents permanents vers des usages détournés", a-t-il ajouté.
Mardi, quatre parlementaires de tous bords, élus de territoires très touristiques où les logements manquent, avaient détaillé de leur côté sept propositions pour mieux réguler les meublés de tourisme.
"Ce qui nous préoccupe lourdement, c'est la fuite, la transformation de logements pérennes en meublés touristiques. C'est vraiment une vague immense, c'est un tsunami", a déclaré Julien Bayou, député EELV.
"J'ai typiquement une entreprise qui se délocalise aujourd'hui, parce qu'elle est en phase de forte croissance et elle ne peut pas attirer des cadres parce qu'ils ne peuvent pas se loger", a abondé Christophe Plassard (Horizons), élu à Royan (Charente-Maritime).
"Prix affolants"
"Les prix sont affolants, on arrive dans des situations où des gens, des locaux, ne peuvent pas vivre sur leur territoire", a affirmé le député Iñaki Echaniz (PS, Pyrénées-Atlantiques), citant des soignants "obligés de dormir dans leur voiture pendant l'été parce qu'ils sont mis en dehors de leur logement".
Ce dernier a été nommé mercredi corapporteur, avec la députée Renaissance du Finistère Annaïg Le Meur, d'une proposition de loi qui sera examinée mi-juin à l'Assemblée nationale.
"On a une fenêtre de tir, on la prend et on arrache ce qu'on a à arracher parce que depuis trop longtemps on dit que ce n'est pas suffisant, mais on ne fait rien", a expliqué jeudi Iñaki Echaniz, présent au côté d'Emmanuel Grégoire, tout en reconnaissant qu'il faudra "aller encore plus loin", en augmentant notamment la taxation sur les résidences secondaires sans pénaliser les résidents à l'année.
Le texte, qui comprend trois mesures, conditionne la possibilité de faire de la location touristique à la réalisation d'un diagnostic de performance énergétique, sur le modèle des locations de longue durée, sauf dérogation.
Les députés veulent également renforcer la compétence des petites communes touristiques. En zone tendue, elles pourraient conditionner la location touristique à une autorisation préalable de leur part, notamment en cas de changement d'usage d'un local ou d'un logement. Cela n'est possible aujourd'hui que dans les villes de plus de 200.000 habitants.
Le texte réduit enfin la niche fiscale dont bénéficient les meublés de tourisme. Manière de "rééquilibrer la balance" entre logements touristiques et permanents, justifie auprès de l'AFP Annaïg Le Meur, pour qui "on ne peut pas avoir de tourisme sans avoir aussi des actifs qui se logent".
Saint-Malo et Annecy
Interrogé jeudi matin sur BFM Business, le directeur adjoint d'Airbnb France Bertrand Burdet a estimé que la réglementation en France était déjà "très mature".
"Au niveau européen, c'est la plus élaborée (...) Aujourd'hui les règles existent. Des centaines de milliers de Français louent leur logement sur Airbnb. Le revenu médian est de 3.800 euros par an. C'est un énorme complément de revenu en cette période d'inflation (...) on va enlever ce pouvoir d'achat", a prévenu M. Burdet.
Outre Paris, certaines villes ou intercommunalités ont déjà pris des mesures pour réguler les meublés de tourisme. Saint-Malo et Annecy ont ainsi instauré des quotas par quartiers.
Début mars, la justice a autorisé la Communauté d'agglomérations Pays basque à instaurer un mécanisme de compensation: pour chaque logement transformé en meublé touristique, il oblige les propriétaires à produire, dans la même ville et avec une surface équivalente, un bien sur le marché locatif à l'année.