Il s'agit de la première baisse trimestrielle depuis octobre 2014. Une tendance qui s'est confirmée en juillet et qui ne peut que s'amplifier avec la réforme des aides au logement annoncée hier par le gouvernement.
Le marché de la maison individuelle en secteur diffus
Source : Markemétron juin 2017, Caron Marketing LCA-FFB. L’indicateur Markemétron est désormais l’outil de référence de l’Insee et du Trésor Public pour établir leurs prévisions.
Une croissance contrariée au premier semestre 2017
À fin juin 2017, le taux de croissance annuel affiche tout de même + 12,9 % (+ 19,5 % en 2016 et + 13,7 % en 2015), profitant encore des bonnes performances de fin 2016, début 2017. Ainsi, les ventes brutes de maisons individuelles en secteur diffus atteignent 142 000 unités sur un an, contre 133 600 unités en 2016.
L'indice mensuel d'activité 2012-2017 (indice base 100 en 2014)
Au premier trimestre, la courbe des ventes 2017 (violette) survole aisément celles des autres années. À partir du mois d'avril, le marché s'essouffle et descend sous les performances de 2016 (courbe bleue), tout en restant supérieur aux quatre années précédentes.
Les tendances longues du marché
La courbe des ventes annuelles illustre explicitement les conséquences de la crise des subprimes en 2008, le redressement jusqu'en 2010 généré par le plan de relance (PTZ doublé et pass-foncier), la dégradation à partir de fin 2011 suite à la reconfiguration défavorable du prêt à taux zéro et aux tensions sur la distribution de crédits, enfin la reprise amorcée fin 2014 et confirmée depuis grâce notamment au nouveau PTZ (près de 117 000 prêts distribués en 2016, contre 60 000 en 2015). Le ralentissement de la croissance en 2017 est également bien visible.
Sauf forte reprise de la croissance au second semestre, les ventes de maisons neuves devraient terminer l'année 2017 avec un taux de croissance inférieur à 10 % et en dessous de 140 000 unités (contre 133 600 l'an dernier). Loin des années de haute conjoncture supérieures à 160 000 ventes (2006 et 2007), 2017 devrait tout de même représenter le quatrième meilleur exercice de ces 12 dernières années. Les trois dernières années de croissance montrent bien l'efficacité des aides au logement recalibrées depuis fin 2014 et la rapidité de réaction positive du marché.
Les tendances régionales du marché
Au deuxième trimestre 2017, dans la plupart des régions, les ventes de maisons individuelles en secteur diffus ont connu un net affaiblissement en glissement annuel, alors qu'elles affichaient des taux positifs élevés au premier trimestre sur tout le territoire. La Normandie (- 11 %), les Hauts-de-France et le Centre Val de Loire (- 9 % chacune) subissent les chutes les plus importantes. L'Occitanie (- 7 %) et la Bourgogne-Franche-Comté (- 6 %) ne font guère mieux. Seules les régions Bretagne (+ 14 %) et Pays de la Loire (+ 4 %), et dans une moindre mesure PACA (+ 2 %), tirent leur épingle du jeu en conservant une croissance solide.
Le marché de la promotion immobilière
Source : SDES/ECLN août 2017
Dans la promotion immobilière, le décrochage du deuxième trimestre 2017 est encore plus accentué. Alors que les trois premiers mois de l'année enregistraient encore des ventes en hausse de 8,1 % par rapport à la même période en 2016, le deuxième trimestre 2017 affiche un recul de 9,4 %. Sur un an, les réservations à la vente de l'ensemble des logements neufs des promoteurs progressent tout de même de 13 % (soit 126 611 unités), bénéficiant de la croissance des mois précédents.
Les réservations des logements collectifs des promoteurs reculent de 9,3 % au deuxième trimestre 2017, contre une hausse de 8,3 % les trois mois précédents. Les prix de vente augmentent encore de 0,7 % : un appartement neuf se vend en moyenne 3 959 euros le mètre carré.
Pour les maisons individuelles en secteur groupé, les ventes diminuent de 10,8 % au deuxième trimestre 2017, alors qu'elles avaient gagné 5,3 % les trois premiers mois de l'année. Les prix de vente baissent de 1 % : une maison neuve se vend en moyenne 250 792 euros en secteur groupé.
Pourquoi maintenir les aides au logement sur l'ensemble du territoire
Lorsque le prêt à taux zéro (PTZ) a été créé en 1995, ses auteurs l'avaient conçu comme un instrument universel pour permettre aux ménages modestes d'accéder à la propriété sur l'ensemble du territoire (une seule distinction dans les barèmes d'attribution : entre l'Ile de France et la province).
L'approche par zonage, qui s'est renforcée les années suivantes, part de présupposés selon lesquels il y aurait d'un côté des zones tendues, qui devraient être privilégiées pour accueillir le maximum de constructions avec une concentration des aides de l'État et, de l'autre, des zones hors tensions dans lesquelles le libre jeu du marché devrait suffire à satisfaire un équilibre entre l'offre et la demande.
Une vision malthusienne
Cette vision est alimentée par des raccourcis consistant à déclarer qu'on construit trop en France là où il n'y a pas de besoins et pas assez là où seraient « les vrais besoins ». Le choix des mots étant révélateur de la volonté d'ignorer des territoires moins urbains dans lesquels curieusement il n'y aurait pas de besoins.
Cette vision malthusienne, qui a eu cours fin 2011 avec la réforme portée par le Ministre Benoist Apparu, vient de retrouver ces dernières semaines une vigueur particulière, qui s'est concrétisée avec l'annonce d'une concentration du PTZ et du dispositif PINEL sur les seules zones A, A bis et B1.
A-t-on réellement construit là où ne sont pas les besoins ? On peut en douter lorsqu'on observe que 20 % du territoire accueille 80 % des constructions. Et toutes les études prouvent qu'on a construit ces dernières années plutôt là où étaient les besoins.
Réalisme contre volontarisme
Il y a en fait deux visions qui s'opposent : celle des volontaristes qui veulent concentrer les aides publiques sur les zones où la tension du marché est la plus forte et celle des réalistes qui préfèrent orienter les aides là où l'effet déclencheur est le plus élevé (cf. article Bernard Vorms dans Métropolitique février 2012). Or il apparait clairement que l'effet déclencheur des aides diminue au fur et à mesure que les prix s'élèvent, en rappelant que les coûts de construction et du foncier croissent avec la densité (Étude JC Castel, Colloque ADEF octobre 2005).
Tout arbitrage conduisant à concentrer l'aide publique sur les zones tendues en privilégiant la densité aboutit à ce paradoxe d'aides qui doivent être plus fortes, mais qui sont condamnées à être très faiblement efficaces.
Il suffit de se reporter aux montants de PTZ (régime 2013) en zone A qui étaient 3 fois supérieurs à ceux de la zone C, alors que le nombre d'opérations financées en A étaient 3,5 fois inférieur (source SGFGAS).
Des taux d'effort identiques dans les zones tendues et détendues
Par ailleurs, le débat entre zones tendues et zones détendues est biaisé par l'approche faite autour du seul prix des logements, alors qu'il convient de mesurer le taux d'effort des ménages pour se loger. Or ce taux d'effort est important sur tous les territoires : si le prix des logements est moins élevé en B2 et C, ce n'est pas pour autant que leur accession est aisée et peut se faire sans aucune aide. Si l'on se réfère à deux indicateurs habituels qui mesurent le coût relatif des opérations d'accession (rapport entre le coût d'achat et le revenu du ménage) et le taux d'effort supporté (part du remboursement des crédits dans les revenus du ménage), on constate qu'il est aussi coûteux pour un ménage d'accéder à la propriété dans une commune de 2 000 à 5 000 habitants que dans une agglomération de plus de 200 000 habitants (cf. communication du professeur Michel Mouillart, Entretiens logement Inxauseta août 2017).
L'aide publique doit donc porter sur l'ensemble des territoires. Et ce, d'autant plus que les zones C et B2 abritent plus de 34 000 communes et près de 60 % de la population. Les dernières statistiques disponibles sur le PTZ (1er trimestre 2017) montrent que les zones B2 et C mobilisent 56 % de la distribution dans le neuf et 84 % dans l'ancien.
Le dispositif en cours jusqu'à fin 2017 répondait donc parfaitement aux besoins des primo-accédants, permettait de créer des logements dans des zones où l'offre locative sociale est faible et l'offre locative privée souvent inadaptée aux besoins des familles. Sans oublier le maintien et le développement des emplois dans des territoires où le bâtiment est bien souvent l'un des rares employeurs.