Si l’ambition est louable, la question se pose, immédiate : comment les nouvelles technologies peuvent véritablement contribuer à l’amélioration de la rentabilité des acteurs de la construction et, plus globalement, au renouveau de la filière du bâtiment ?
Si tous les secteurs de l’économie, des plus traditionnels aux plus avant-gardistes, mettent actuellement tout en œuvre leur transformation digitale, force est de constater que le secteur de la construction peine à prendre ce même virage. Malgré l’omniprésence des solutions CAO et l’avènement du BIM et de la maquette numérique, le sentiment général est que l’apport de la technologie reste limité quand il s’agit de gérer des projets de construction. Ainsi, 57 % de patrons français dans le domaine du BTP sont convaincus que la transformation digitale n’est qu’un phénomène de mode[1]. Les acteurs de la filière restent encore trop attachés aux papiers et post-its, outils d’un autre siècle… Si les réticences face à des innovations encore insuffisamment connues ou maitrisées sont compréhensibles, il n’en reste pas moins que les entreprises françaises du secteur n’ont plus le choix et doivent s’engager dans cette transformation digitale pour rester compétitives face à leurs concurrents étrangers.
Voici les trois raisons majeures pour lesquelles ces technologies vont bientôt devenir les incontournables de demain :
1. Adopter le digital pour mieux accompagner l’inévitable mobilité ?
Avec le nombre croissant d’outils disponibles sur les app stores, les collaborateurs sont parmi les premiers à tirer profit des nouvelles technologies au quotidien. Afin d’optimiser et simplifier le travail, les chefs de projet, les architectes et les ingénieurs recourent tous à des applications pour planifier leurs tâches, accéder aux informations nécessaires sur le chantier, consulter les maquettes numériques et les dessins électroniques sur un iPad ou un smartphone ou encore prendre des photos sur site.
Le développement exponentiel de la mobilité des collaborateurs est la principale explication de cette adoption massive des applications mobiles au quotidien. Partagés entre le bureau, les chantiers et les réunions externes, les collaborateurs s’appuient sur des applications afin de rester opérationnels quel que soit l’endroit où ils travaillent. Les entreprises pour leur part ne peuvent plus ignorer cette nouvelle donne et cette évolution dans les habitudes de travail des différents acteurs d’un chantier. Elles se doivent d’encadrer ces initiatives numériques individuelles en mettant à disposition une plateforme centralisée, compatible avec les différents outils et capable d’agréger leurs données.
2. Répondre au besoin de transparence en encourageant la collaboration
Les entreprises du secteur de la construction peuvent et doivent également s’appuyer sur les nouvelles technologies pour accroitre et améliorer la collaboration entre les membres d’une équipe. Aujourd’hui, le nombre et le volume des flux d’échanges entre les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre, les bureaux d’études, les cabinets d’architectes et les autres acteurs d’un projet de construction explosent. Une récente étude a montré que les projets de construction génèrent des volumes d’information colossaux pouvant atteindre jusqu’à 6 To (soit 6000 Gigaoctets) de données comprenant des milliers de mails, des centaines de plans 2D et de modèles BIM avec des versions révisées, etc. Face à cette multiplication de données, formats et sources, il devient difficile de s’assurer que les bonnes informations, les précisions et les révisions sont systématiquement partagées avec toutes les parties concernées.
Force est également de constater que les projets de construction restent majoritairement organisés en silos, ce qui nuit au bon échange d’informations et augmente les risques d’erreurs donc de surcoût et de retard du projet. C’est pourquoi les entreprises doivent impérativement décloisonner leurs organisations pour mieux tracer les échanges et être à même de garantir des réalisations de qualité. Pour y parvenir, il convient de proposer à l’ensemble des partenaires un accès centralisé aux informations d’un projet, intégré avec des plateformes utilisées par les différents acteurs au quotidien et accessible depuis plusieurs endroits. Etant donné que la taille des projets et le nombre des intervenants impliqués ne cessent d’augmenter, de tels outils collaboratifs, vont bientôt devenir la condition sine qua non pour qu’une entreprise de construction reste compétitive.
3. Partager les connaissances pour capitaliser sur les bonnes pratiques
Enfin, la fragmentation du travail et la dilution des responsabilités entre les différents acteurs rend le partage de bonnes pratiques difficile, voire impossible. Trop souvent, une fois que l’équipe se sépare à la fin du projet, les expertises et les connaissances acquises, pouvant enrichir considérablement le savoir-faire d’une entreprise et contribuer à ses futures réussites, disparaissent purement et simplement. Le déploiement du plan de la transition numérique dans le bâtiment permettrait justement aux entreprises de collecter ces données précieuses et d’identifier les meilleures pratiques grâce à des solutions d’ordre technologique. La mise en place des outils de gestion de projet et d’une plateforme d’agrégation centralisée pourrait notamment servir en tant que plateforme de gestion des connaissances, permettant aux entreprises de minimiser leurs risques et ainsi éviter des futures pénalités tout en maximisant leurs marges.
Le secteur de la construction est un des piliers de l'économie nationale et une des plus importantes sources d’emplois. La transition numérique dans le bâtiment est une formidable opportunité pour les entreprises de la construction françaises de tirer parti d’une nouvelle phase de croissance des activités et des revenus de cette filière. En effet, selon un rapport du cabinet McKinsey[2], « si les technologies étaient pleinement déployées, elles pourraient engendrer une gigantesque valeur économique, estimée à près de 1 000 milliards d’euros en France d’ici 2025 ». Le rapport souligne que « cette valeur proviendrait à la fois de la valeur ajoutée générée par les entreprises et du « surplus » capté par les consommateurs ».
C’est pour ne pas manquer cette opportunité, que le secteur de la construction en France doit impérativement accélérer sa transformation digitale avant que les grands projets à venir, aussi bien nationaux qu’internationaux, ne soient accaparés par des entreprises étrangères, pour qui les nouvelles technologies constituent d’ores et déjà un acquis fondamental.
[1] IPSOS, L’Observatoire social de l’entreprise : Vague 10, 2016
[2] McKinsey & Company « Accélérer la mutation numérique des entreprises : un gisement de croissance et de compétitivité pour la France », septembre 2014